A 40 ans, le champion de cesta punta Eric Irastorza, numéro un des arrières de Miami pendant dix ans, a décidé de raccrocher le gant. Il revient sur sa décision de prendre sa retraite à Miami. Mais il n’arrête pas complètement la cesta punta et monte de nouveaux projets en parallèle.
Qu’est-ce qui vous a motivé à prendre votre retraite à Miami ?
Eric Irastorza : La situation un peu précaire que l’on a à Miami. Il faut savoir qu’il y a deux ans on a été rachetés par des financiers. Le jai alai de Miami est devenu un casino. Il faut savoir qu’il y a 1 500 machines à sous qui travaillent tous les jours et qui rapportent beaucoup d’argent au détriment de notre sport. Le jai alai est en perte de vitesse, au détriment de ce casino, où ils font beaucoup d’argent tous les mois.
Je ne vais pas dire que ça m’a motivé mais je ne pouvais plus continuer à jouer comme ça tous les jours pour une société qui ne donne aucune importance à notre sport. Je me suis dit ‘il va falloir tourner la page’ mais là aussi il fallait que j’attende d’autres opportunités. Il y a peut-être l’ouverture du fronton de Mexico au mois de mars. Ensuite, j’ai différents projets sur le Pays Basque. Tout est arrivé au même moment pour pouvoir tourner la page ici à Miami et faire autre chose.
Que retiendrez-vous de ces années passées à jouer à Miami ?
E.I : J’ai quand même été très privilégié. Les premières années, on est jeune, on a 22 ans, on arrive à Miami, on apprend beaucoup de choses ne serait-ce qu’au niveau de la langue, de la culture. A côté de ça on joue trois heures ou quatre heures à la pelote et c’est ce que je voulais. C’est toujours ma passion et c’est quelque chose qui restera toujours ancré en moi. J’ai passé seize ans qui ont été des années magnifiques et ces deux ans où ça a été un peu plus précaires. Je pense qu’il est temps pour moi de passer à autre chose.
A l’époque, qu’est-ce qui vous avait poussé à partir à Miami plutôt que de rester au Pays Basque ?
E.I : C’était me permettre de jouer à la pelote, qui est ma passion, tout en gagnant ma vie. Pour moi, il n’y avait pas photo. Le seul endroit où on pouvait en vivre toute l’année c’était ici, à Miami. J’ai eu la chance de connaître Daniel Michelena qui m’a fait venir ici et avec qui j’ai joué pendant quelques années et aussi la chance d’avoir un super patron qui aimait notre sport et qui nous a aidés pendant plusieurs années. Je me retrouvais dans ce choix et, ma foi, je ne regrette pas de l’avoir fait.
Comment voyez-vous l’avenir de la cesta punta à Miami ?
E.I : L’avenir je ne le vois pas très bien parce que notre sport est mis de côté. Les joueurs qui restent essaient de ne pas subir trop la pression de la compagnie qui je pense, à un moment donné, va leur enlever le jai alai. Ça va être très compliqué parce qu’à côté de ça ils ont les machines avec le casino qui rapportent beaucoup d’argent donc ce sera très compliqué pour la cesta punta de survivre à tout ça.
Tous les joueurs ont pris une jolie claque au niveau des salaires. Ensuite, on avait quand même des avantages, on touchait des pourcentages sur les machines à sous. Mais au-delà de ça, ce sont ces gens-là qui ont une vision négative par rapport à ce sport, parce qu’ils ne peuvent rien en faire. On est là parce qu’on doit être là pour faire vivre le casino mais c’est tout. C’est à la fois triste et embêtant pour nous mais à un moment donné il faut faire un choix. Pour moi, maintenant, c’est fini et on se tourne vers autre chose.
Quel a été votre meilleur souvenir en tant que joueur ?
E. I : Il y en a plusieurs. Il est évident que mes titres de champion du monde professionnel ont été très importants pour moi. Après, si on revient sur Miami, je crois que la première année a été pour moi cruciale. Au bout de trois mois je gagnais le plus grand tournoi de Floride qui était à l’époque doté de 250 000 dollars. Et ça par un concours de circonstance. Le meilleur arrière de Miami s’était blessé, moi je venais d’arriver et Daniel Michelena m’a imposé pour jouer ce tournoi avec lui et on le gagne. Pour moi, au bout de trois mois, je suis rentré déjà dans les papiers du patron en gagnant ce tournoi. Ça restera gravé dans ma mémoire.
Quels sont vos projets à présent ? Allez-vous revenir au Pays Basque ?
E.I : Je reviens début février, pendant un mois, peut-être avant d’aller au Mexique jouer pendant un mois. J’ai déjà quelques petites affaires chez nous. J’ai l’opportunité de monter un restaurant sur la plage de Biarritz. On va s’attacher à faire quelque chose de sympa, à mon image et au vécu que j’ai eu pendant toutes ces années Outre-Atlantique. On aimerait l’ouvrir pour Pâques, pour le mois d’avril. Il y a des travaux à faire. Ça se met petit à petit en place et j’espère qu’au mois d’avril on sera opérationnel. C’est un petit challenge pour moi parce que c’est pas du tout mon secteur d’activité et ma foi je suis content de faire ça.
Vous prenez votre retraite à Miami, allez-vous continuer à jouer, au Pays Basque par exemple ?
E.I : J’ai tourné la page Miami mais je me sens bien, je continuerai à jouer. Si le corps me le permet, et aussi la tête, j’aimerais faire encore quelques années pour jouer encore chez nous, voire au Mexique et continuer à apporter à ce sport qui demande encore plus de développement. Ce sport m’a beaucoup donné et il est temps pour moi de donner à ce sport.
© Marc Mittoux
PALMARÈS
- 2 fois champion du monde amateur en 1995 et 1998
- 2 fois champion du monde professionnel en 2000 et 2013
- 3 fois vainqueur du tournoi d’Orlando
- 9 fois vainqueur du Gant d’or de Biarritz
- 9 fois vainqueur des Internationaux de Saint-Jean-de-Luz